vendredi 2 mai 2014

Serpico (1973)

Sidney Lumet, ce grand cinéaste engagé, n'hésitant pas à dénoncer les maux de la société et les institutions des États-Unis, ne pouvait pas trouver mieux comme sujet, en adaptant le livre de Peter Mass : Serpico.

Le roman d'origine raconte la véritable histoire de Frank Serpico. Ce policier dénonçant la corruption générale au sein de la police de New-York. David Durk et lui témoigneront devant la commission Knapp, un comité créé pour enquêter sur les malversations au sein de l'institution. 

La naissance du projet est venue lors d'un déjeuner entre le producteur, Martin Bregman & l'auteur du livre Peter Mass. Les deux hommes négocient les droits de la future adaptation cinématographique. Les scénaristes Waldo Salt, connu pour Macadam Cowboy, & Norman Wexler, sont engagés pour écrire le script. Le cinéaste John G. Avildsen (Rocky) était initialement pressenti à la réalisation du long-métrage. Il fût retiré du projet en raison de différences d'opinions avec le producteur Martin Bregman. Sidney Lumet prit les rênes du projet, modifia le scénario, le trouvant trop long au premier abord. Le véritable Frank Serpico, fût invité sur le plateau de tournage, pour donner son point de vue, apportant ainsi certains points sur le réalisme du long-métrage. Mais très vite le réalisateur, lui demanda de quitter les lieux pour ne pas gêner le jeu d'identification des comédiens, en particulier Al Pacino.

Photo du véritable,
Frank Serpico

Frank Serpico est un policier New-Yorkais, refusant la corruption des différents services de police auxquels il postule. Véritable agent de terrain, ce dernier s'habille en civil, adoptant ainsi le cadre de vie de ses congénères. De plus en plus isolé au sein de ses pairs, traversant une descente aux enfers, pour ses prises de positions, contre cette gangrène à bord de l'institution. Après onze ans de dénonciation et d'une lutte solitaire, l'intégrité de Frank Serpico est enfin reconnu par la haute hiérarchie…


Dés la scène d'introduction, nous sommes plongés dans l'ambiance fracassante et violente de ce polar âpre : Une ambulance sirène hurlante, gyrophares allumés, défilant à toute berzingue dans les rues de New-York, à l'arrière, Frank Serpico en sang, fiévreux et cheveux hirsute, arrive à l'hôpital. L'homme posé sur un brancards est immédiatement emmené au bloc-opératoire. On repense alors au début de L'impasse de Brian De Palma, toujours avec Al Pacino, vingts ans plus tard.

Puis, on retourne quelques années en arrière, à la fin des années 60. Lors de la remise des diplômes de l'académie de police. On découvre Frank Serpico, entouré de sa famille, jeune diplômé modèle. Ce jeune homme bourré d'idéaux, voulant changer le monde, ne trouve pas de poste adéquate au sein de l'institution, n'hésitant pas essayer plusieurs services internes. Arrive enfin les seventies, ce policier exemplaire, se laisse aller peu à peu, devenant un peu baba-cool dans son style vestimentaire, physique - cheveux hirsutes, longue moustache & barbe, porte des habits hippie - et à l'esprit Peace & Love. Bien sur ce changement gène ses confères et ses hiérarchies. Frank Serpico arrivera à imposer cet aspect par des arguments. Ainsi la frontière de la loi et de la rue se brisent petit à petit. 

A l'époque de la sortie de Serpico, les méthodes d'investigations, font rêver, nombre de policiers Français. Ces derniers ne rêvaient d'une chose, endosser un blouson en cuir, se fondre dans la foule en parcourant les rues de Paris, à la manière de leur confrère, Frank Serpico à New-York.  


La corruption au sein de la police de New-York est omniprésente, allant du petit arrangement avec les commerçants, jusqu'aux rackets des réseaux de drogues ou de bookmakers clandestins. Ses combines sont le quotidien de la plupart des policiers de la Grosse Pomme : Du Bronx, à Brooklyn en passant par Manhattan. 

Frank Serpico, intègre, refuse le moindre dollars. Considéré comme une brebis galeuse parmis les siens, il lutte contre ce fléau. Son combat devient un véritable acharnement, aux dépends de sa propre vie personnelle, son intimité privée est inexistante. Au fur et à mesure, le policier est hanté par cette obsession de justice, devenant paranoïaque, agressif à cause des menaces quotidiennes de ses confrères. Cette preuve de courage, et de détermination l'amène à témoigner devant la commission Knapp, pour dénoncer ses méfaits. 

Serpico, redonne espoir et à la fois désabuse. L'espoir, que des hommes intègres existent encore, mais la déception de voir qu'ils sont une poignée et perdent toujours. 

Al Pacino porte Serpico sur ses épaules, son interprétation est magistrale, avec justesse et sensibilité. Les seconds rôles gravitent autours du comédien. L'excellent travail d'écriture de Frank Serpico, fait découvrir par petites touches, sa vie privée : Fils de commerçant gravissant les échelons, aimant se cultiver tout seul, tente de s'élever socialement. A tendance à fuir ses relations amoureuses, quand elles deviennent trop sérieuses.Tout ses éléments permettent à s'attacher a ce personnage.

La ville de New-York, est un personnage à part entière. Comme à l'accoutumée chez Sidney Lumeton ressent cet amour pour la Grosse Pomme, des bas quartiers populaires du Bronx en passant par Manhattan. Tel un peintre, le cinéaste dépeint l'atmosphère urbaine de la cité, "la ville qui ne dort jamais" n'a jamais été aussi bien filmée, entre ses blocks, ses ruelles sombres, ses immeubles dégradés et la violence y régnant.   

Comme d'habitude, Sidney Lumet millimètre sa mise-en-scène, la rendant sèche par moment. Aidé par une photographie à l'aspect quasi-documentaire similaire à French Connection. Les nombreuses ellipses temporaires, montrent l'évolution de Frank Serpico sur de nombreuses années : Son changement capillaire, rasé de prêt à ses débuts adoptant une apparence un peu plus négligé ; Le chiot adopté grandit au fil du film… Un excellent soucis du détail, faisant rentrer le spectateur dans le récit.

La composition de Mikis Theodorakis, à la sonorité proche d'Ennio Moriccone colle parfaitement à l'atmosphère. 

Basé sur une histoire vraie, ce portrait touchant, réaliste de cet homme intègre, idéaliste du nom de Frank Serpico, est magistralement interprété par Al Pacino. Sidney Lumet, offre un regard sans concession sur les maux de la société Américaine. Ici sur la gangrène organisée des différentes institutions policières New-Yorkaises. Une référence du polar des années 70 !

Affiche Japonaise
Affiche Italienne

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire